Compiègne Ouest sortie 9
Read MoreStéphanie, conseillère clients dans une grande société, travaille de 9 à 21 heures du lundi au samedi. Elle gagne le Smic. En instance de divorce, elle va devoir gérer seule le quotidien et les dépenses avec ses trois enfants. Ces derniers sont venus avec elle sur le rond-point pour le réveillon. Elle m’a confié qu'ils la supplient de ne pas aller vivre en appartement. Ils ne veulent pas perdre le jardin dans lequel ils peuvent s'amuser. Le soir du 31, Stéphanie distribue des bracelets fluorescents pour plaire aux marmots. Bientôt, tout le monde dispose du sien : une belle intention, une façon aussi de se reconnaître et de se soutenir entre Gilets jaunes.
Patrick, routier et disque jockey. Le soir du 31, c'est lui qui a prêté son matériel et qui s'occupe de la musique. Son installation est conséquente, son matériel impressionnant. A 21h, il lance le son et souligne ironiquement : « Les gendarmes ont dit pas trop fort.. ». La boule à facette tourne, le bleu, le vert, le rouge et le jaune clignotent sur le pylône luminaire du rond-point. Le premier morceau sera « Rien lâcher » de Johnny Halliday, puis suivra « Mistral gagnant » de Renaud ainsi que le fameux « On lâche rien ! » de HK et les Saltimbanques.
Anne-Marie, 61 ans, le soir du 31. Elle se définit comme une "veuve très en colère". Maman de trois enfants, elle a travaillé à l'usine trois jours par semaines pendant plusieurs années puis au péage de l'autoroute à temps plein avant d'être arrêtée suite à des problèmes de santé qui ont dégénérés : " J'ai été 7 ans en arrêt puis licenciée suite à un mauvais diagnostic de ma blessure au pied. Je suis passé du fauteuil roulant aux béquilles et j’ai finalement subi une opération du pieds où on m'a mis des vis. C'est ça qui m’handicape ainsi que mon hernie discale et la déviation de ma colonne suite aux années béquilles. Mais ça ce n'est pas reconnu comme un accident du travail. (...)
Aujourd'hui, j’ai été déclarée inapte à tous postes donc impossible de travailler pour moi ! Mon mari était routier, donc ça allait, mais il est décédé en 2014 suite à un cancer. Je vis avec sa pension de réversion. Il a pu prendre sa retraite a 55 ans mais pas profiter longtemps ! (...) Je commence seulement à sortir ma tête de l’eau. C'est difficile depuis son décès. Nous étions marié depuis 1977, un coup de foudre hé oui ça existe ! J'ai été obligé de vendre à grande perte notre maison à la campagne et j’ai racheté un appart à Compiègne. Bon pas si mal, il y a pire que moi, mais ça a été une période très dure. (...) Ce qui m'a fait être gilet jaune, en premier, c'est pour mes filles , et mes petits enfants plus tard, et pour moi car je suis déjà taxé sur la pension réversion et ils parlent de reprendre encore 25% en plus. Je ne suis pas d'accord, mon mari a travaillé parfois 15 h par jour pour que nous soyons a l’abri, pour que nous ayons une maison, pour que nos filles puissent faire des études et avoir un bon métier. Pour moi c'est le voler que de vouloir encore plus !"photo alternative réveillon:
Amélie aide soignante dans une maison de retraite et son compagnon Sébastien consultant dans une société d'assurance : "C'est un cumul de choses qui font que les gens en ont ras le bol. Moi, personnellement, c'est le ras le bol fiscal. je fais partie des classes moyennes et j'en ai ras le bol d'être matraqué. C'est aussi l'injustice concernant les anciens. Mes parents, ils sont limites à la rue parce que voilà on leur taxe la CSG. Et au niveau de la santé il n'y a plus de service public ! Ma femme, je vois dans quelle misère elle bosse, des horaires de fou pour être payée une misère alors que ce sont des gens qui devraient être mis en avant, reconnus, valorisés. "